Les Xylocopes ou Abeilles charpentières

En ces premiers beaux jours, peut-être avez-vous vu (ou entendu car son vol est bruyant et rapide !) un gros insecte volant ressemblant à un très gros bourdon noir à reflets métalliques allant butiner sur les premières fleurs ouvertes.

Eh bien non, il ne s’agit pas d’un bourdon mais du Xylocope, autrement appelé « abeille charpentière ». Il s’agit même de la plus grande abeille d’Europe !

En effet, Les Xylocopes appartiennent à la même famille que les Abeilles (et les Bourdons !).

La tribu des Xylocopini ne compte d’ailleurs qu’un seul genre, Xylocopa, décrit en 1802 par l’entomologiste français Pierre-André Latreille.

Mâle de Xylocope violacé sur fleur de ciboulette (Allium schoenoprasum L., Alliacées)
Village d’Aubrac (Aveyron) – 10 juin 2018
©Nathalie Blondel-Baur

On dénombre 209 espèces de Xylocopes de par le monde (source : Lifemap-Université de Lyon). Parmi toutes celles-ci, la France métropolitaine n’en compte que 4 :






Le Xylocope irisé ou Petit Xylocope bleu (Xylocopa iris). Espèce plutôt méditerranéenne, même si l’on constate qu’il remonte vers le nord puisqu’il a été observé en Maine-et-Loire.
C’est le plus petit des 4 !

Le Xylocope violacé (Xylocopa violacea) qui est de loin l’espèce la plus présente en France.

Le Xylocope panard (Xylocopa valga). Il ressemble beaucoup au Xylocope violacé d’où un risque de confusion important entre les deux espèces.

Le Xylocope brun (Xylocopa cantabrita) dont la population n’est, quand à elle, localisée que dans 2 stations (Massif de la Sainte Baume et vers Perpignan).

  Xylocope irisé
© Hugues Mouret (Wikipédia)        
Xylocope violacé
©Nathalie Blondel-Baur
Xylocope panard            
© Hugues Mouret (Wikipédia)
Xylocope brun
©RikenMon (Wikipédia)
 
Source : faune-alsace.org

Classification et répartition en France

Source carto : atlashymenoptera.net

Les Xylocopes sont solitaires et ne fondent donc pas de colonies. Si on les appelle aussi « abeilles charpentières », c’est parce qu’elles creusent une galerie dans le bois mort pour y pondre leurs œufs.

Un peu d’étymologie :

Hyménoptère : vient du grec Υ μ η  hymen (membrane) en référence aux ailes membraneuses sans écailles avec juste un poil de poils très peu visibles

Xylocope : emprunté au grec ξ υ λ ο κ ο ́ π ο ς  Xylokopos (qui coupe du bois) dexylos, bois et koptein, couper

Les Xylocopes sont  thermophiles, c’est à dire qu’ils aiment la chaleur. On les retrouvera donc en situation ensoleillée.

S’il est généralement facile d’identifier les Xylocopes par rapport aux autres hyménoptères, encore faut-il les distinguer entre eux :

Le Xylocope brun (X. cantabrita) est brun et le Xylocope violacé (X. violacea) est noir à reflets métalliques violacés. Jusque là, tout va bien.

Là où ça se complique, c’est entre Xylocope violacé (X. violacea) et Xylocope panard (X. valga) tous les deux à reflets métalliques : pour les différencier, il faut observer les antennes !

Pour les mâles, c’est facile : chez X. violacea, les deux avant-derniers articles sont orangés et le dernier est déjeté et tourné vers l’intérieur alors que chez X. valga, toute l’antenne est noire. Et les femelles alors ? Oui, mais d’abord comment distinguer les mâles des femelles ?  C’est encore une histoire d’antennes ! Il suffit de compter les articles :
12 chez la femelle et 13 chez le mâle. Et cette distinction est valable chez tous les Hyménoptères !

Pour en revenir à nos deux Xylocopes et à leurs antennes : mâle et femelle du Xylocope violacé ont le troisième article aussi long que les articles 4, 5 et 6 réunis alors que mâle et femelle du Xylocope panard ont le troisième article aussi long que les articles 4 et 5 réunis.

Un autre critère de distinction valable pour les femelles de ces deux espèces se situe au niveau des pattes postérieures : la forme du plateau basitibial du tibia postérieur est différente : large zone bosselée et mate chez Madame Xylocope panard, deux rangées de dents entourant une plage lisse chez Madame Xylocope violacé.

Attention aussi en ce qui concerne le Xylocope irisé (X. iris), de plus petite taille. Si on le différencie bien des 3 autres du fait justement de sa taille, il existe cependant un risque de confusion avec l’Abeille maçonne à poils roux appelée aussi Chalicodome des murailles (Megachile parietina). La différence notable étant la couleur de l’extrémité des pattes antérieures : noires chez X. iris alors qu’elles sont roussâtres chez Megachile parietina. De plus, cette dernière n’a pas de brosses de récolte sur les pattes postérieures mais sur le ventre.

Xylocope irisé
© Hugues Mouret (Wikipédia)
Chalicodome des murailles (on distingue bien les pattes roussâtres)
© Alchetron

Bien sûr, ne vous amusez-pas à les regarder à la loupe en plein butinage !

Mieux vaut les photographier (en macro c’est mieux) et agrandir sur l’ordinateur.

Dès les premiers beaux jours, Les mâles vont sortir les premiers et aller butiner. Les femelles apparaissent 10 à 15 jours plus tard. C’est le moment de l’accouplement, suivi de la ponte dans des galeries d’1,5 cm de diamètre et d’une longueur pouvant atteindre les 30 cm, creusées par les femelles dans le bois mort et non traité, exposé au soleil : arbres morts, souches, tas de bûches, piquets, poutres, rambarde d’un vieux balcon et même parfois branches de sureau ou tiges de roseau ou de bambou dont la moelle est facile à extraire… voire d’anciennes galeries d’insectes xylophages.

Le Xylocope irisé (Xylocopa iris), plus petit, va nicher dans des tiges creuses : angélique, chardon, asphodèle, bardane, berce, maïs ou tournesol.

Les Xylocopes sont dotés de puissantes mandibules permettant ce travail de forage de galerie qui peut prendre un certain temps. La sciure est rejetée à l’extérieur, un indice qui nous permet de détecter le nid… Les œufs sont pondus un à un dans des logettes séparées les unes des autres par une mince paroi constituée de sciure et de salive. Une pâtée pollinique constituée  d’environ 2 g de pollen aggloméré est laissé par la femelle dans chaque logette, permettant à la larve de se nourrir. Celle-ci n’est effectivement pas  xylophage et ne creuse pas le bois. La femelle referme ensuite l’orifice d’entrée, parfaitement circulaire, au moyen de copeaux agglomérés. L’éclosion a lieu quelques jours après. Le stade larvaire dure 3 semaines suivi de la nymphose. Un mois plus tard, c’est l’émergence de l’imago (= insecte adulte). Ils vont sortir les uns après les autres, de la première à la dernière loge, chaque Xylocope attendant la sortie de celui qui le précède, même si, parfois, un individu un peu plus pressé arrive à sortir en forant une « sortie de secours ».

Source : Edward STEP, Marvels of insects life, 1916

Une femelle peut, au cours de la saison faire jusqu’à 3 pontes, donc creuser 3 nids. Chaque ponte peut compter jusqu’à une douzaine d’œufs.

Les imagos (= adultes) des deux sexes vont ensuite passer l’hiver à l’abri du froid dans une cavité d’arbre mort, une fente de vieux mur ou même dans un trou, sous terre.

©jbergner – Wikipédia

On rencontre le Xylocope notamment dans les jardins, les vergers, les parcs et en lisière de forêt.

Le Xylocope n’est ni agressif ni farouche. Il n’est pas dangereux et seule la femelle possède un dard (comme tout bon hyménoptère femelle qui se respecte !) mais ne s’en servira que si elle se sent menacée. Sa piqûre peut être douloureuse.

Xylocopa sp. sur Ail à tête ronde (Allium sphaerocephalon L., Alliacées) Village d’Aubrac (Aveyron) – 16 juillet 2015
© Nathalie Blondel-Baur
Xylocopa violacea mâle sur ciboulette (Allium schoenoprasum L., Alliacées) Village d’Aubrac (Aveyron) – 10 juin 2018
© Nathalie Blondel-Baur

Se nourrissant de pollen et de nectar, notre Xylocope est un butineur infatigable, capable de parcourir de longues distances, doté d’une très bonne vue lui permettant de s’orienter et d’une trompe robuste. C’est un très bon pollinisateur et donc un auxiliaire appréciable au jardin. Même s’il est polylectique, c’est-à-dire qu’il butine plusieurs espèces de familles différentes, sans distinction, les scientifiques ont pu observer quelques préférences, notamment les Lamiacées et les Fabacées. Compte tenu de sa grande taille, les espèces robustes à grandes fleurs lui conviennent mieux : la plante ne doit pas s’écraser sous son poids ! C’est pourquoi on l’observe assez souvent sur les Glycines (Wisteria sp.), les Gesses (Lathyrus sp.), la Vipérine (Echium vulgare L.), les Chardons (Carduus sp. et Cirsium sp.) et bien sûr les Sauges (Salvia sp.). Lorsque la fleur est trop petite pour lui – en début de saison, pas question de faire la fine bouche : il faut bien faire avec ce qui est fleuri ! – le Xylocope n’hésite pas à devenir pilleur de nectar : en jouant de la mandibule, il fait un trou sur le côté du tube floral ce qui lui permet d’accéder directement au nectar, sans polliniser la fleur.

Vol qualifié de pollen sur Jasmin d’hiver (Jasminum nudiflorum Lindl., oléacées) !!!
Le coupable : Xylocope violacé mâle. Rodelle (Aveyron) – 23 février 2022 
© Nathalie Blondel-Baur

Bien que figurant sur la liste rouge européenne des espèces menacées, son statut n’est pas encore réglementé en France. Cependant, on peut raisonnablement penser qu’il est sensible, comme les autres insectes et a fortiori les hyménoptères, à la perte de biodiversité, à la dégradation de son environnement sans oublier l’impact des pesticides dont les néonicotinoïdes si préjudiciables aux abeilles et dont l’utilisation, en France, vient d’être prolongée pour les cultures de betteraves sucrières (parution JO le 1er février 2022) !

Petite synthèse :

Le saviez-vous ?

  • Chez les hyménoptères, comment distinguer les mâles des femelles ? Il suffit d’observer les antennes et de compter les articles : 12 chez la femelle et 13 chez le mâle !
  • En Afrique subsaharienne, les Xylocopes sont un des principaux groupes de pollinisateurs des Fabacées
  • Xylocopa iris est le seul pollinisateur connu de 2 orchidées : Ophrys spruneri en Grèce et Ophrys sipontensis en Italie
  • Combien pèse un Xylocope ? De 1 à 1,6 g, selon l’espèce !

Pour en savoir plus :

http://aramel.free.fr/INSECTES18ter-41.shtml

https://www.insectes-net.fr/xylocope/xylocop1.htm

https://www.faune-alsace.org/index.php?m_id=20329

http://www.atlashymenoptera.net/page.aspx?id=214

https://www.brut.media/fr/entertainment/le-xylocope-la-plus-grande-abeille-d-europe-494ab1f4-20eb-466d-abf3-98b36f8c55b6

1 réflexion sur “Les Xylocopes ou Abeilles charpentières”

  1. bonjour
    cet hiver ,il y en a une qui est rentrée dans mon salon,je n ai aucune idée par ou lle est entrée,comme il fait assez froid dehors,je lui ai donné de l eau melangé a u miel et mise dans une boite en attendant avril pour la ressortir.
    ai je bien fait,pour l instant elle a l air d aller bien
    merci pour vos commentaires
    cordialement

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